A Place To Hide - EdgarxJalen

{ a place to hide }
- Jalen Brogan-Moore & Edgar Weaver -

« Il le cherche du regard dans chaque lieu qu’il foule, le garçon dans les bois. L’enveloppe kraft bien en sécurité dans son sac, il cherche le visage sur les images. Pas de nom, seulement un corps et il cherche, il cherche, il cherche. Ça fait deux semaines. Tout les jours, Jalen capture des dizaines de portraits mais n’en voit qu’un. »

Le chauffage avait rendu l’âme quelques heures plus tôt, laissant Jal tremblant, assis sur son lit défait. Il ne parvenait pas à détacher son regard des quelques photos étalées devant lui. Tout les soirs le jeune photographe se retrouvait seul avec lui même, happé par ces images - ou plutôt ses images-. Plusieurs fois, il ressentit l’envie d’y mettre le feu ou de les enterrer comme il l’avait fait avec les autres. Les enterrer là où il l’avait trouvé, lui, le joli garçon des bois. Celui avec la peau porcelaine et les longues jambes frêles, pureté brisée. Jalen l’avait trouvé d’une beauté presque illusoire, tant et si bien qu’il n’avait pas pu s’empêcher de presser le déclencheur de son appareil pour saisir cet instant d’étonnante poésie.

Pourtant, Jal regrettait désormais plus que tout de s’être immiscé dans ce moment d’intimité, il ne savait plus quelle était la bonne chose à faire. Le chercher à tout prix ou se débarrasser de ces clichés inquiétants. La vérité ou le secret. Jalen alluma fébrilement une cigarette, les quatre murs de son appartement semblaient se rapprocher de plus en plus, prêts à le faire disparaître dans une spirale confuse. C’était trop, il se leva d’un coup et claqua la porte derrière lui, sans oublier de glisser à nouveau les photographies dans leur enveloppe, puis dans son sac.

Le Roadhouse n’était pas un endroit que Jal fréquentait beaucoup, il ne fréquentait, à vrai dire, pas beaucoup d’endroits mais il avait terriblement besoin d’un verre et d’une présence sous ses draps pour réchauffer son corps brûlé par le froid. Installé au comptoir, Jalen observait avec attention la belle couleur ambrée du liquide dans son verre qui portait encore les traces d’un lave vaisselle de qualité médiocre. La chaleur dans son verre, il voulait la même serrée contre lui. Il lâcha un long soupir et quitta son tabouret en direction des toilettes insalubres au fond du bar. C’était durant des instants comme celui-ci que Jal se disait qu’il avait réellement un problème mais ses prises de consciences ne duraient que très peu de temps, le temps de sortir son attirail de son sac.

La porte de la cabine s’ouvrit sur ce qu’il d’abord cru être un miroir. Incontrôlable, il referma derrière lui et poussa le loquet. En être démuni face à ses propres actions, Jal fit un pas en avant, puis deux et tendit la main vers la joue sans défauts du visage devant lui, sous ses doigts la douceur d’une peau encore candide. Il est là.

{ a place to hide }
- Jalen Brogan-Moore & Edgar Weaver -

la nuit a happé le soleil dans sa chute et s'est étendue sur les horizons de twin peaks. il est là, et lui aussi. le regard plongé dans celui de son reflet, il se sourit. edgar n'est pas lui. edgar est lui. l'enfant s'est accaparé encore une fois du jeune adulte. le bal peut alors commencer. soirée foudroyante. c'est au roadhouse que se passera le drame. ficelé dans sa salopette, edgar quitte la demeure, la clope accrochée aux lèvres. ça trainasse des pieds, en se perdant dans les étoiles. ça ne pense pas. la pédale hurle en silence. seul le crissement des chouettes est audible. elles regardent l'enfant qui marche, elles contemplent l'adulte qui pleure.

la musique frappe. du hard-rock. pas son genre. edgar est difficile, amateur de musique classique. mais quand danser rime affreusement avec baiser, on se fiche des détails. perdu dans la foule, les mains coincés dans ses fins cheveux, il tortille son bassin avec toute la sensualité du monde. les yeux ravagés par les sanglots, la haine et le désespoir, il les repose en présentant ses deux paupières. divagation. edgar veut sortir d'egdar, il est encore trop tôt. le désastre. il faut du désastre. un sourire, mêlé à une idée.

la petite pute se faufile dans les wc, à la recherche d'une cabine libre. porte fermée, non verrouillée, il sort de sa poche le sachet. la poudre pénètre alors les narines. les muscles se contractent, les pupilles se dilatent et edgar est oublié. il gémit en se collant au murs qui l'entourent. ses doigts caressent la surface. ses ongles glissent, c'est bon. il a faim. que la vie est surprenante quelques fois. la vie veut jouer. les cartes se posent, le hasard n'y est pour rien. la porte s'ouvre. un homme. ils se morfondent dans un échange de regard. il entre dans la cabine de wc, et enferme l'asiatique avec lui. l'inconnu tend sa main et la pose sur la joue d'edgar qui ne tarde pas à la repousser et à la tordre d'une force insoupçonnée. on me touche pas. l'adolescent lâche son bras et plaque l'inconnu contre le mur avant de nouer son corps contre le sien. c'est moi qui touche. sourire aguicheur, il se met à rire, quelques secondes qui durent une éternité, un rire vicieux, insalubre, presque déplacé. il glisse ses doigts sur la bosse de sa proie et parcourt du bout de sa langue sa mâchoire. finalement, il y perd sa bouche dans son cou. la drogue monte, l'excitation aussi. de plus, edgar ne s'était jamais tapé de black. une occasion d'expérimenter, et de se faire encore plus de mal. un corps et une bouche qu'il ne contrôle pas, des envies qui ne sont pas les siennes, edgar est le pantin d'egdar. la partie ne fait que de commencer.

Il le deteste, il le deteste parce qu'il ne pensait pas en avoir envie jusqu'à ce que ça arrive. Le garçon porte encore les joues un peu rebondies de l'enfance, celles de Jalen sont mutilées par les lames des épreuves qu'il s'est infligé. Il frémit sous ses caresses, pousse un long soupir quand ses lèvres gercées viennent lui chatouiller le creux du cou. Quand joli-garçon releva la tête, Jal ne pu affronter ses pupilles dilatées. Il s'approcha lentement. Un frisson. Sa bouche comme pour un baiser, il rencontra le bout de son nez et captura les résidus de poudre qui s'y trouvaient, accueillis avec plaisir par ses gencives impatientes. Enfermé dans cet instant de désir absolu, Jalen en oublia presque ce qui l'avait poussé à pousser le loquet de la porte, il ne voyait plus que la beauté qui l'avait tant fasciné ce jour là dans les bois. Dans ces moments ci, sa gorge se nouait et il retournait dix ans plus tôt, quand il etait incapable de s'exprimer par les mots. Le photographe s'eloigna un peu et devoila l'enveloppe, ses doigts tremblaient tant qu'il etait incapable d'en sortir le contenu. Déversées sur le sol des dizaines d'images.

Son zippo vieux comme le monde à la main, Jal fixait toujours ses chaussures, il n'arrivait pas à le regarder, pas après ce qu'il avait vu. "Explique, ou je crame tout." Il marmonna de sa voix grave et hésitante que si peu de gens ont eu l'occasion d'apprécier. Cigarette qui crépite au contact de la flamme, c'etait son son préféré, il faut un certain silence pour l'entendre et le silence c'etait lui.

Ces quelques mots seraient les seuls. Le garçon etait chanceux, preuve qu'il occupait déjà une place spéciale. Jalen avait comme l'impression de le connaître mieux que personne depuis qu'il avait pris la liberté de bafouer son intimité mais il aurait surement préféré ne jamais l'avoir rencontré. Même si sa peau, même si la douceur du bout de ses doigts fins, même si sa bouche gourmande, même s'il avait envie de détruire les photographies pour toujours et de l'emmener avec lui pour réchauffer son lit de pierre. Le doux bruit de sa cigarette et la fumée qui les survolent. Le rien est un plaisir, le plaisir ce n'est pas rien. Jal se souvenu d'elle, il aurait aimé lui montrer les images, peut être qu'elle serait encore là aujourd'hui. L'histoire se répète. Cette fois il voulait comprendre. Comprendre et toucher. Comprendre et goûter. Quelque chose d'usé, de brisé dans ce corps si jeune. À explorer.